DE PIF À PLAYBOY : LE DIKTAT DE LA COM’ POUR LA COM’ !
À
l’ère de l’ultra com', du diktat des « conseillers » et de
leur « idée de génie », rien n’est étonnant et tout est
possible. Ainsi, un Président peut accorder une interview à Pif
(gadget) ; une ministre poser en Une de Playboy, comme S. Royal,
jadis, dans Le Parisien Magazine, se muait en « Liberté
guidant le peuple » en toge blanche, pieds nus et drapeau à la
main.
À
l’ère de l’ultra com', tous les supports se valent. Fini les
arbitrages entre la presse régionale, nationale et magazine en
fonction des objectifs, des messages et du ciblage. Aujourd’hui, il
n’y a plus de hiérarchie ni de différence de cibles entre les
supports. Diktat du buzz oblige, il n’y a que des opportunités,
des rebonds possibles, des événements-marketing à créer pour le
buzz et des relais souhaités, en masse. Ainsi, à l’heure du «
brand-content », Pif (Gadget) vaut Le Point, Playboy vaut L’Express,
Chasse, Pêche et Nature vaut Marianne. Ce qui compte dorénavant,
c’est moins la cible que la reprise médiatique (forcément) tout
azimut. Le support (papier, numérique, audiovisuel…) n’est qu’un
prétexte, rien d’autre.
À
l’ère de l’ultra com', tous les intervieweurs se valent aussi.
Un journaliste, un youtubeur, un influenceur, un vidéaste-animateur,
un écolier : qu’importe l’interlocuteur, c’est le «
sparring-partner », choisi pour son originalité et casté pour le
spectacle, qui compte, rien d’autre.
Aussi,
compte tenu de la crise actuelle, l’interview d’E. Macron dans
Pif puis celle de M. Schiappa dans Playboy qui, à l’ère du
spectacle politique décomplexé ne surprendront personne, tombent
plutôt mal en termes de timing. Elles confirment néanmoins toutes
les deux que dans le champ politique, il n’y a désormais plus de
distinction entre « le frivole et le sérieux ». Le frivole, c’est
du sérieux. Et inversement.
Illustration
du diktat du coup de com’ permanent, ces interviews, sous forme
d’happening dans Pif et Playboy, confirment la dimension (trop)
spectaculaire de la politique : une logique de « com’ de marque »,
à l’heure de la défiance des élus, qui continue chaque jour un
peu plus de discréditer le politique et de nuire à la politique, de
façon plus générale.
Les
conseillers politiques et autres communicants devraient être payés
pour pouvoir dire « non ». Encore faudrait-il en avoir le courage.
Par
François Belley, essayiste,
auteur
de l'essai " Le Nouveau Spectacle politique " (Editions
Nicaise)
https://lnkd.in/ghgFYEh8