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mercredi 7 juillet 2021

De Greta à Francis : le diktat des "têtes" médiatiques.

Les médias suivent la mode : en premier lieu celle de l'air du temps. Pour l’intérêt marketing que génère le lancement d’un nouvelle gamme de produits médiatico-politiques sur le marché, la presse opportuniste s’inscrit toujours dans la tendance du moment : de l’engouement pour le « temps des femmes » (Ségolène Royal), à celui des « non professionnels de la politique » (Les Gilets Jaunes) et « des saltimbanques » (Bigard, Hanouna ou Lalanne…), en passant par celui « des populistes » (Zemmour), des égéries (Assa Traoré) ou encore des « écologistes post-ado » (Greta Thunberg).

Le système peut s’appuyer et miser en même temps  sur une voire plusieurs « têtes » médiatiques : des produits à la mode souvent court-termistes qui répondent au besoin permanent de renouvellement du spectacle. À l’inverse d’un chef de parti au modèle vieillissant, la « tête » médiatique génère de facto de la nouveauté. Elle crée surtout beaucoup plus de bruit dans l’histoire qu’elle sait raconter au public à grands coups de contenus : du happening classique dans les talk-show jusqu’au partenariat surprise avec une marque d’escarpin. Photographiée et filmée, commentée et analysée : la « tête » médiatique inspire les médias qui peut la présenter la veille comme la nouvelle figure politique, le lendemain même comme un héros contemporain.

Dans le monde de l’entreprise, dans celui du sport ou de la politique, la « tête » médiatique, glorifiée un temps par l’époque spectaculaire, est attendue sinon construite. Elle est choisie avant tout pour son potentiel de vente et de narration : car celui qui a le vent en poupe doit se retrouver aussitôt en première de couverture, s'installer inéluctablement dans les baromètres de popularité et se voir tester dans les sondages. En faire à terme un produit présidentiable : voilà la finalité de la « tête » médiatique pour les médias de masse. « Candidat, pas candidat ?, « Se présentera, ne se présentera pas ?, « Ira, n’ira pas ? » : le casting de l’élection à venir avec le médiatico-politique à la mode comme nouvelle tête de gondole providentielle est l’obsession du journaliste, obsédé par la personnification du jeu électoral. Nous le voyons chaque jour un peu plus.

Lors d’une interview « politique, » la nouvelle « tête » médiatique, souhaitée ou mise de force par le système sur la liste de départ, importe toujours plus que les raisons pour lesquelles elle s’est engagée sur le marché "politique". Chez les journalistes, cette fétichisation du casting permanent par le diktat des noms et des visages illustre la personnacratie insupportable de la vie politique actuelle. "François Belley". Politique spectacle. 

François Belley

http://francoisbelley.fr

jeudi 24 juin 2021

L' art du suspense permanent.


Recette d'un thriller haletant, d'un film accrocheur ou d'une série réussie, le suspense est l'ingrédient indispensable du scénario pour tenir en haleine le lecteur, le spectateur comme le conso-électeur. Au sein de la politique-spectacle, entretenir le flou, c’est entretenir la flamme. Celui qui sait laisser planer le doute sur ses intentions, jouer avec la rumeur, se dire « intéressé » tout en écartant, habilement de l’ordre du jour la question posée sur ses ambitions personnelles gagne aussitôt l’attention des médias et du public. « Se présentera-t-il ? », « Se déclarera-t-il ? », « Se lancera-t-il ? » : le vrai-faux suspense médiatique propre à tout bon récit est un moyen facile de faire monter les enchères, laisser les débats se faire et les publications envahir les réseaux sociaux comme les moteurs de recherche.

« Je ne sais pas », « si l’opportunité se présente», « je me prépare au cas où », « si les conditions sont réunies », « je n’exclus rien », « je me déciderai au moment venu » : à la veille d’une élection majeure, le médiatico-politique se montre prévisible dans l’exercice télévisuelle de l’incertitude. Pour garder du temps d’antenne, condition sine qua none à l’existence médiatique, l'aspirant présidentiable esquive la réponse, sème le trouble et, si le journaliste reformule et insiste trop, largue tel un pilote de bombardier les éléments de langage du spectacle.

Pour des raisons tactiques, le médiatico-politique, aussi stratège qu’un professionnel de la politique, attend et entretient le suspense. Adepte du teasing, il fait confiance pour une fois au temps long pour acquérir de la valeur auprès des masses. Pour gagner la bataille de l’image et remporter le débat de personnes, celui qui est vu et présenté comme un « candidat probable » sait spéculer sur sa petite personne. À l’appui d’un schéma rhétorique rôdé, "le politique" se dit d’abord « dans une phase d’écoute », puis « prêt au débat » avant de se lancer officiellement... ou non. Cette dramaturgie est un jeu de dupes. Si elle sert à la fois le médiatico-politique et le journaliste en quête de la déclaration attendue, de l’annonce exclusive et du scoop à vendre, les intentions et les destins des coureurs sont souvent bien connus en coulisses. François Belley. Politique spectacle.

François Belley

http://francoisbelley.fr

 

 

People-politique, politique-people et politique spectacle.


La politique d’aujourd’hui s’inscrit dans une époque aux rôles inversés où, à l’écran, le show-business fait de la politique et le politique assure le spectacle.

À l’heure du coup de com permanent, le people est devenu aujourd’hui le politique : celui qui s’engage publiquement, se lève et se bat pour une cause. Désormais, cest « le people-politique » qui a besoin du politique traditionnel comme béquille, caution et relais pour ses discours et autres prises de position. Dorénavant, quand « le people-politique » (Justin Bieber) se déplace, c’est le politique (Emmanuel Macron) qui demande le selfie en cascades. À l’instar d’une reine de la pop, d’une ex-mannequin playmate ou d’un chanteur de rock irlandais, « le people-politique » fait l’actu et occupe le terrain.

Soumis au spectacle permanent, le politique traditionnel est à l’inverse devenu un people décomplexé : celui qui, en sa qualité de star des magazines, truste la rubrique « scoop », quand ce n’est pas celle plus trash des « faits divers ». Désormais, cest « le politique-people » qui participe à l’écran au divertissement de masse.

Qu’il soit « président de la République » ou « chroniqueur-intermittent », cest « le politique-people » que suivent en priorité les photographes, les producteurs comme les animateurs. En promotion continue de lui-même, cest en effet bien « le politique-people » qui court les émissions de talk-show et s’accroche aux plateaux pour commenter l’indignation et l’engagement du people-politique. C’est encore et toujours le politique-people qui se ré-approprie un peu plus chaque jour l’univers, les codes et le langage des stars. Et après, on s’étonne du désintérêt bientôt total pour la discipline politique. 

François Belley 

http://francoisbelley.fr