La
télévision comme
canal
historique
de
diffusion de la politique-spectacle a
un pouvoir inégalitaire
: elle
rend en
apparence plus
« intelligent » et
plus « grand
», plus
« puissant », plus
« beau » et
plus
« influent »
ceux qui y
passent
plutôt
que ceux qui la
regardent.
La
télévision est
ainsi. Elle
déforme
la réalité, la
maquille souvent
aussi
parfois, même
grossièrement.
Ce
n’est
un secret pour personne. Depuis
toujours, la
télévision fait
« le »
et
« la » politique.
C’est
elle qui
construit
encore
les
personnages,
raconte
les
histoires,
installe
les
thèmes, les personnalités
et
les
candidats
qu’elle
finit
par imposer
comme
une tendance voire
une évidence,
par un
effet
de répétition et
de grossissement.
La
télévision aujourd’hui,
à
travers notamment l’omniprésence
des
chaînes en continu,
est
avant
tout une
fabrique d’images
et
d’opinion,
de
notoriété et
de popularité. Ainsi,
qu’il
s’agisse d’un politique
(Macron,
Zemmour…) ou
d’un
thème de campagne (immigration,
écologie, made in France...),
un
« bon » produit
doit
passer
à la télévision, passer
et repasser
non-stop
sur
les chaînes d’information
jusqu’à
ce que
le dit produit, marketé par des professionnels, finisse par rentrer
dans la tête du conso-citoyen.
Pour le consommateur habitué
aux marques du petit écran,
le
« vu et
revu à
la télé » institutionnalise
et
rassure. En apparence, il constitue
encore un
gage
de sécurité, de
crédibilité
et
de
légitimité.
La
séquence extensible de la pandémie, à travers notamment
l’intervention
en
boucle de
nombreux apprentis-médecins, continue de le démontrer chaque jour.
À
la
manière du "fait divers" et de
"la polémique", du "débat" ou de "l’affaire",
tout
personnage politique se
construit
de
manière cathodique avec
des images
fortes,
des
émotions vives,
des
plans
rythmés,
des
séquences travaillées
et
surtout
une
fréquence d’apparition dans l'écran, qui n'a rien de petit.
Tenue,
sourire, gestuels, mimiques,
regard,
mains, style vestimentaire, apparence,
élocution,
voix,
débit: à la télévision, le message passe d’abord
par
l’image. Alors le politique qui
suit docilement les normes médiatiques imposées par l'écran s’entraîne
à
regarder
droit une
caméra,
à
contenir
son stress, à
formuler
un message, à
faire court, clair et concret pour apparaître au
mieux.
Chez
le politique-cathodique, la
moindre anomalie est corrigée, les
traits de personnalités gommés
ou
amplifiés parfois pour
entrer
dans le format télégénique et faire du politique un « bon
client » comme les autres.
La
télévision, à
travers notamment
les
chaînes d’info et
leur talk-show,
ont
formaté le politique, l’ont
moulé médiatiquement : autrement
dit, l’ont
préparé pour le spectacle de l’écran. Pour qu'à la veille de la campagne présidentielle, le "produit politique" soit tout à fait mûr, c'est-à-dire prêt à être consommé.
François Belley
http://francoisbelley.fr